Interview

Vous avez été professeur agrégé de l’Education nationale, vous occupez depuis des années les fonctions de consultant auprès de grandes entreprises publiques et privées et êtes gérant majoritaire dans un cabinet d’audit et de conseil. Comment passe-t-on de l’enseignement à  l’audit-conseil ? En quoi la connaissance de ces domaines et les compétences que vous avez développées vous sont-elles utiles pour les audits que vous effectuez dans le cadre de la labellisation Qualité français langue étrangère ?

J’ai exercé plusieurs métiers, parfois en parallèle : enseignant et formateur de formateurs, directeur d’un centre de langues et de formation continue, auteur et directeur de collections pour enfin créer mon propre cabinet d’audit – conseil - ingénierie en langues (CRIBLE) au service de grandes entreprises comme Renault, Snecma puis Safran, IRSN, Télédiffusion de France, Banque de France, CACIB, ou du ministère de l’Industrie dont j’ai audité les formations linguistiques en 1995.
Auditer est la synthèse de toutes ces expériences qui m’ont permis, dans des environnements différents, d’enseigner, de conseiller, de gérer et manager, d’innover, de concevoir et écrire, de combiner plusieurs activités, d’être réactif et surtout de toujours me remettre en question. Elles ont été confortées par des études en sciences de l’éducation et des stages de formation dans le métier de la qualité.

Quelles ont été vos motivations pour devenir auditeur Qualité français langue étrangère ? En quoi cette démarche s’inscrit-elle dans vos fonctions actuelles et/ou passées ?

Dans le cadre de mes audits de centres multi langues, j’ai trouvé dans le domaine du FLE des formateurs investis dans la veille pédagogique, l’animation, le soutien aux stagiaires, l’innovation,  parfois dans la mutualisation des pratiques. Ce sont des sujets qui me tiennent à cœur et j’ai souhaité nourrir ma réflexion en allant plus souvent sur ce terrain faire des observations plus approfondies.
Je me dois également d’être proactif dans le conseil que j’apporte à mes clients, ce qui m’amène à exercer de pair veille pédagogique, recherche  et observation de pratiques.
Mais surtout, auditer un centre dans sa globalité, est chaque fois une expérience riche d’enseignements et une source de très grande satisfaction, sur le plan pédagogique et humain.

Quelles qualités personnelles vous paraissent fondamentales pour être auditeur ?
Et dans la relation avec les audités ?

L’impartialité et l’indépendance sont le socle sur lequel doivent se greffer des capacités d’analyse et de synthèse, de curiosité et de critique, d’organisation et de gestion du temps, une ouverture d’esprit, ainsi que l’adaptabilité aux situations que nous rencontrons, chaque fois différentes.
Avec les audités, nous nous devons de rester naturel et humble, de savoir les écouter et  de les entendre tous de la même manière, de prendre la distance nécessaire selon les différents moments de l’audit.
Enfin, nous ne serions pas auditeurs si nous n’étions pas passionnés par l’ingénierie de  formation, la pédagogie, et le contact humain.

Quel est votre meilleur souvenir d’audit ? Avez-vous une anecdote à raconter sur le déroulement d’une mission d’audit, un imprévu, un quiproquo… ?

Chaque audit est pour moi une découverte, un nouveau monde à comprendre. Ma plus grande satisfaction est de constater chez nos différents interlocuteurs que nous nous sommes appropriés leurs problématiques, leurs spécificités pour arriver à une évaluation la plus juste possible.
Un imprévu : trouver 60 % des dossiers entièrement vides
Un imprévu et un quiproquo : le contenu de dossiers remplacé par une attestation en guise de preuve
Une anecdote : entendre la même dictée, assez longue, avec un décalage d’une ou deux secondes, dans deux salles contiguës mal insonorisées

Selon vous, quelles sont les clés d’un audit réussi ? Quels sont les pièges à éviter ?

Du côté des auditeurs, une parfaite entente, une complicité dans le binôme senior - second est impérative, du début de l’audit jusqu’à la rédaction finale du rapport. On ne peut pas terminer la mission  sans avoir croisé nos critères, mis en commun nos observations, relevé les points forts, réfléchi sur nos interrogations réciproques, demandé l’aide et l’avis du CIEP lorsque nécessaire et cherché toutes les preuves qui pourraient montrer l’adéquation aux demandes du référentiel.

Du côté du Centre, une préparation approfondie est essentielle. Elle nous permet de gagner du temps, de faire les allées et venues nécessaires entre les documents et l’observation des pratiques sur le terrain.
Enfin, la qualité du dialogue permanent entre le personnel du centre et les auditeurs est un gage majeur de réussite.

Avez-vous des conseils à formuler en direction des centres pour les aider à mieux se préparer à l’audit ?

La démarche qualité est un processus continu d’amélioration d’un centre, visant à optimiser son organisation, sa gestion, ses prestations, sa performance. Elle est participative et implique l’ensemble du personnel, en s’appuyant sur un engagement fort des responsables. Elle s’accompagne d’une nécessaire formalisation, d’une mutualisation des supports, activités et pratiques. L’important est de s’engager résolument dans cette démarche, de sensibiliser tous les acteurs, de les rassurer, de les motiver pour alors commencer à diagnostiquer les forces et les faiblesses, établir un plan de progrès, et s’engager dans l’action pour assurer la qualité à long terme. Il sera ensuite facile et rapide de collecter les preuves nécessaires à apporter aux auditeurs.
Pour terminer,  j’ajouterai l’intérêt de la démarche qualité qui aboutit sur des modes de fonctionnement interne simplifiés, identiques pour tous et plus efficaces, un personnel plus reconnu, plus motivé, ainsi que sur la nécessaire fidélisation de la clientèle et son impact sur la promotion du centre.